On s'arrête. Stop. Et on souffle.
En musique: Bach - Toccata and Fugue in D minor
Il m'a dit: "Vous êtes tout au bord, et il suffirait d'un détail pour que la bonbonne explose".
La bonbonne, c'est moi.
Alors il m'a arrêtée. Il m'a donné dix jours pour que la pression retombe. Et pour que je puisse penser à l'avenir. Prendre le temps de ça.
Pendant l'heure où je me suis rendue chez le médecin, les emails continuaient d'arriver.
Une cliente qui sait pertinemment que l'équipe n'est pas là, et qui nous demande à 10h d'envoyer une proposition pour 11h. Toujours cette même question de vie ou de mort. Et la grande chef répond oui. De toute façon, ce n'est pas elle qui fait. Alors c'est facile. D'ailleurs Emma, puisque tu n'es pas venue ce matin, tu peux t'en occuper? Je ne réponds rien, car j'en reste sans voix.
"Est-ce que vous vous sentez débordée?".
Débordée? Non.
Totalement dépassée, oui.
Dépassée par le fait que quelqu'un qui sait que tu n'es pas là continue d'exiger de toi.
Continue de tirer sur la corde usée.
Juste pour voir si elle va péter. Ou peut-être pas. Peut-être que l'autre tire sur la corde sans même s'en rendre compte.
Et c'est presque pire.
"Laissez vous vivre"
D'accord.
Je vais me laisser vivre. Et prendre le temps de penser à toute cette vie qui m'angoisse. Au-delà du bonheur que je ressens et que je n'ignore pas. Il me reste dix jours pour que le bonheur mange l'angoisse. Et la digère sans s'en rendre malade.