Il a dit: Je ne sais pas quand.
En musique: Chopin - Marche funèbre
Ma mère m'a appelée hier soir, et elle m'a dit:
"Il a dit: Je ne sais pas quand."
Au début je n'ai pas compris. Enfin, non. Je n'ai pas voulu comprendre. Parce qu'au fond de moi, je savais très bien de quoi elle me parlait.
Le médecin ne sait pas. Il ne sait pas quand, mais il sait que. Que c'est fini. Et tout n'est qu'une question d'heures. De jours.
Et cette fois, c'est une évidence. Un fait incontournable.
Hier soir, je pensais que Dieu était cruel. Qu'il existe ou non, il était celui sur lequel s'est abattu ma colère.
Je me souviens qu'un jour ma grand-mère avait dit: "Si Dieu doit être indulgent avec moi une seule fois de ma vie, alors que ce soit le jour où je dois partir et qu'il rende ma mort douce; qu'il n'attende pas la seconde où je n'aurai plus ma tête pour le faire".
Dieu est cruel. Parce qu'avec tout ce que ma grand-mère a donné, il aurait été bienvenu qu'il l'écoute.
Dans la foulée je me suis dit "C'est inhumain", et j'ai pensé alors que Dieu n'est pas homme, et qu'il ne faut pas attendre de lui qu'il agisse donc avec humanité.
Dieu me fait chier. Dieu n'existe pas.
Le médecin n'a pas voulu de l'hopital. Il préfère qu'elle parte dans une chambre qu'elle connait. Celle où elle dort chez ma mère.
Il préfère qu'elle parte avec douceur, et qu'elle ne souffre pas. Alors maintenant, il suffit d'attendre. Attente insupportable, incontournable et irrélle.
Mon coeur est fendu et toute la nuit j'ai parlé à ma grand-mère.
Douleur immense qu'est celle qui nous est donnée de vivre aux portes de la mort.