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La Vie Trampoline
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9 octobre 2011

De bon matin... avant d'aller se coucher

En musique: Handel - Israel in Egypt

De bon matin. Le film de Moutout avec Darroussin. Celui qu'il faut voir, vraiment. Avec des imperfections et quelques longueurs, mais un film qu'il ne faudrait surtout pas ignorer. 

C'est l'histoire de Paul, employé de banque, qui dérape. Il arrive un matin au bureau et abat ses deux patrons. De sang froid? Ah non, pas vraiment. La mort-solution, c'est la sienne; là, on parle juste d'une baignoire qui déborde. Et qui fait qu'un matin, on décide de faire basculer le sablier. En sachant pertinemment que cela ne résoud rien, mais que la fin reste une fin, et que la fin d'un enfer est toujours mieux que l'enfer lui-même.

Le film déroule les évènements qui ont pu causer le drame; on repasse la bobine, en arrière. Le truc que l'on fait une fois que la catastrophe a eu lieu et que l'on reprend l'histoire en se disant: "Mais c'est bien sûr". Encore que. 

Les raisons du débordement sont partout et nulle part. C'est la grandeur du harcèlement. Celui qui, bien pratiqué, ne laisse pas de trace sur le corps mais qui enfonce, petit à petit, sans même que l'on s'en rende vraiment compte. Un peu comme le flotteur qui tient le hameçon des cannes à pêche. Comme quand on finit par tolérer l'inacceptable, quand on le laisse entrer dans son quotidien, avec une violence terriblement inouie que l'on accepte sur son territoire parce qu'au fond, on ne l'a pas vue grandir; comme quand les autres autour compatissent mais se taisent. Le silence, arme fatale. 

L'homme se débat dans les petites injustices quotidiennes, dans les énormités qui prennent de plus en plus de place, il essaie de lutter mais la machine est forte, et elle le broie. 

L'homme n'est qu'un composant de cette machine et quand il n'a plus sa place dans le système, quel qu'ait été l'effort fourni et le sacrifice passé, la machine l'éjecte ou le lamine. On ne fait pas de sentiment, dans cette banque ou ailleurs. 

Non, la mort ne va rien résoudre, le système est plus fort que tout; on efface et on recommence, on éjecte et on lamine. 

A la fin de ce film, tu ne ressors pas meilleur, tu ne ressors pas compatissant, mais peut-être ressors tu un peu plus en colère, un peu plus révolté de ces façons de faire devenues si élémentaires et communes. 

J'espère que ceux qui auront vu ce film ne diront plus à celui qui ose raconter les petites humiliations du quotidien qu'il exagère. Non, j'espère que ceux-là penseront à Paul, l'homme anodin et silencieux qui encaisse. L'homme qui décide de verser du sang parce qu'elle est bien la seule violence que l'on entend.

 

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Commentaires
P
Moi, j'ai traité le harcèlement par le mépris :D<br /> Et le pire, c'est que quand je croise petite conne et grand connard, c'est eux qui détournent la tête, pas moi...
E
Phil > ah non, moi je me soigne par le taï et par la zumba, tu sais bien! :) <br /> Sixteen > je connais très bien ce livre, l'un des plus marquants que j'ai pu lire récemment...
S
Sur le harcèlement et la violence silencieuse, cet été, j'ai lu "Les heures souterraines" de Delphine de Vigan. Assez parlant aussi, dans le genre.
P
Ca te donne des idées pour calmer tes nerfs ?
La Vie Trampoline
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