Ce que m'inspirent les malheurs d'Eva (petit cours de garcitude)
En musique: Antony and the Johnsons - River of Sorrow
Ce soir, j'ai appris qu'Eva et Tony divorçaient. Oulala.
Eva et Tony, c'était un peu un mythe en pleine ascension. La petite avec le grand. L'actrice avec le type qui vend le plus mal les Kinder Bueno.
Et pourquoi Eva s'en va? Parce que Tony l'a trompée. Le cochon.
Je vais vous avouer un truc: cette nouvelle ne m'a pas réjouie, parce que j'aime bien Gaby, elle n'est pas conne (contrairement à son basketteur qui a le QI d'une autruche), mais elle m'a (ré)confortée.
Réconfortée, parce j'ai déjà été trompée par un homme que j'aimais et au-delà de la profonde humiliation que l'on ressent, qui vient s'ajouter à la déception, à la perte de confiance, à la haine, à la tristesse, et à l'incroyable vide qui vous traversent, il y a une question inévitable:
"Si j'avais été plus belle, est-ce que ça aurait changé les choses?"
On se dit que l'on était trop grosse, pas assez musclée, avec trop peu de seins, de fesses, un peu de ventre, etc. Tous les défauts de la terre ressurgissent comme des explications potentielles pour justifier la trahison. Pas assez gentille, pas assez intelligente, pas assez chiante, etc, etc. De quoi finir avec une confiance en soi proche de zéro et une peur-panique de se mettre à nu devant un autre.
Et ce que le malheur d'Eva m'a fait dire, c'est qu'au moins, l'infidélité arrive à tout le monde, même aux plus belles.
Ce qui m'amène aux raisons pour lesquelles cette nouvelle me conforte: elle me conforte dans l'idée que la fidélité n'existe pas.
Imaginer qu'un couple puisse se regarder dans le blanc des yeux sans aller voir ailleurs, c'est se mettre un collant sur la tête et braquer la Brinks: irresponsable. Et celles qui me disent "j'ai de la chance, mon mec ne m'a jamais trompée" me font assez largement sourire. Tout comme les hommes qui s'imaginent ne jamais être cocus me font sourire aussi.
L'infidélité est dans notre nature, j'en suis convaincue. Nous sommes faits pour aimer, et il serait vain de penser que sur les milliers de gens que nous croisons dans une vie, un seul soit capable de nous capter. Non, nous sommes faits pour rencontrer des âmes qui sont soeurs pour un temps, et sont là pour s'accompagner un bout de chemin, plus ou moins long, avec la possibilité de croiser d'autres âmes tout autant faites pour nous. Un seul homme ou une seule femme ne sont pas assez complets pour apporter à l'autre tout ce dont il a besoin. Nous sommes riches à la recherche d'autres richesses, mais nous ne sommes pas assez riches à nous seuls pour combler quelqu'un. Sinon, pourquoi aurions nous deux mains?
Nous avons alors le choix:
- rester avec l'autre parce qu'on l'aime par dessus tout et que l'on accepte sa nature d'être infidèle, parce que l'on conçoit que la polygamie n'est pas une trahison mais une condition parfois nécessaire à l'épanouissement. Si on aime, on veut que l'autre s'épanouisse, quelle qu'en soit la condition. Rester, c'est aimer l'autre au-delà de soi-même et ne pas penser que l'autre est infidéle parce que l'on n'est pas assez bien.
- partir, parce que la douleur est trop forte, parce que l'on s'imagine pouvoir être un jour suffisamment riche pour combler tous les désirs de l'autre, parce que le partage n'est pas négociable. Parce que l'on prend l'infidélité comme une punition.
J'admire ceux qui restent. Moi, je n'ai pas pu. Je ne peux pas jurer que je ne serai jamais infidèle, car la vie est complexe. Mais aujourd'hui je peux dire que je sais. Je sais la douleur que l'on prend le risque d'infliger à celui que l'on trompe. Et pour moi, même si certaines pages sont tournées, celle de la douleur me semble insurmontable. Parce qu'en étant trompée, ma confiance a été brisée deux fois: celle que j'ai donnée à l'autre avec tant de mal, et (surtout) celle que j'avais de moi-même.
Que l'on m'explique comment il est possible de briser à ce point quelqu'un si on l'aime. Moi, je n'ai pas de réponse.
Et ce soir j'imagine qu'Eva, aussi belle soit-elle, doit se sentir bien seule.